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Chapitre 9 : Bonnet d’âne

Résumé du chapitre

Depuis deux mois, Iris, devenue une âme errante, tente de s'adapter à sa nouvelle condition. Prisonnière d'une existence où elle ne peut ni manger ni dormir, elle s'ennuie profondément. Pendant ce temps, Antoine Morel, son père de substitution, sombre progressivement dans l'alcool, tiraillé par une crise identitaire liée à son alter ego dans l'autre réalité. Sa relation naissante avec Danièle, marquée par une quête de plaisirs charnels, l'éloigne davantage de sa fille.

 

Un jour, Iris, lasse de sa monotonie, s'aventure seule jusqu'au village voisin et découvre un collège. Fascinée par ce lieu d'apprentissage, elle entre dans une salle de classe où elle rencontre Giuseppe De Luca, un élève espiègle et fils de la directrice. Après une scène comique qui le contraint à porter un bonnet d'âne, Giuseppe révèle être clairvoyant : il peut voir et entendre Iris, contrairement aux autres.

 

De retour à la ferme, Iris partage avec enthousiasme sa journée auprès de sa grand-mère, mais son récit est brutalement interrompu par Antoine. En colère face à l'insoumission de sa fille, il interdit strictement toute nouvelle escapade et, dans un accès de rage, pulvérise une cruche contre le mur avant de quitter la maison.

 

Malgré les interdictions, Iris tient à honorer son rendez-vous avec Giuseppe, et sa grand-mère accepte de l'accompagner en cachette à la messe dominicale. Durant l'office, Giuseppe emmène Iris dans la chambre des cloches, son refuge secret. Là, Iris lui confie venir de l'année 2024 et chercher un moyen de regagner son époque. Giuseppe lui suggère de rencontrer Monsieur Garemesse, un vétéran au visage marqué par la guerre et réputé pour sa connaissance du surnaturel.

 

C'est ainsi qu'ils retrouvent Monsieur Garemesse à la terrasse d'un café. Après avoir écouté l'histoire d'Iris, ce dernier écrit une réponse énigmatique : « Qu'elle fasse ses adieux, et je l'accompagnerai moi-même à la maison du Démon et libre elle sera. »

 

Au retour à l'église, Iris découvre son père furieux, guettant sur le parvis. Alors que sa grand-mère lui fait signe de fuir, Iris, désormais consciente du danger que représente Antoine, confie à Giuseppe une blessure causée par un éclat de cruche, preuve qu'il peut l'atteindre malgré sa condition d'âme errante. Elle décide alors de se réfugier chez Giuseppe pour échapper à son père.

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Analyse des points clés

La condition fantomatique d’Iris

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  • Iris vit dans un entre-deux-mondes, un état ambigu où elle échappe à certaines lois physiques (elle traverse les murs) mais reste vulnérable (elle peut être blessée physiquement). Cela crée une tension constante entre son statut d'esprit et sa fragilité.

  • Son existence est marquée par un profond ennui et une solitude existentielle qui érodent peu à peu son moral, illustrées par l'absence de sommeil, de nourriture et de relations sociales.

  • Son invisibilité, sélective et énigmatique, accentue sa dualité : tandis qu'elle est ignorée de certains, elle forme des connexions significatives avec d'autres (notamment sa grand-mère et Giuseppe).

 

 

Les personnages capables de percevoir l’invisible

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  • Giuseppe et la grand-mère partagent un don singulier : celui de détecter les âmes vagabondes. Ce talent les démarque et crée un lien intime avec Iris, qui trouve en eux une forme d'acceptation.

  • Giuseppe exprime l'idée qu'il n’y a « point d’hasard », suggérant une dimension presque prédestinée à leur rencontre. Cela renforce le caractère exceptionnel de leur interaction.

 

 

 

La quête du retour et la dimension temporelle

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  • Iris confie son origine (2024) et son désir de retrouver son époque, introduisant une dimension temporelle et surnaturelle au récit.

  • L’énigmatique message de Monsieur Garemesse évoque un rituel mystérieux impliquant « la maison du Démon », ajoutant un aspect initiatique à la quête d’Iris.

  • Le passage entre les époques, suggéré comme possible, est cependant entouré de mystère et conditionné par des adieux symboliques.

 

 

 

La détérioration des relations familiales

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  • Antoine, le père d’Iris, s’enfonce dans une spirale d’alcoolisme et de colère, conséquence d’un malaise identitaire profond lié à son double d’une autre réalité.

  • Sa nouvelle relation avec Danièle, focalisée sur le charnel, le coupe émotionnellement de sa fille, amplifiant la douleur de cette dernière.

  • L’épisode où il brise une cruche témoigne de sa violence latente et de son incapacité à gérer ses frustrations, contrastant vivement avec la bienveillance protectrice de la grand-mère.

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Le contraste entre la sagesse d’Iris et la rébellion de Giuseppe

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  • Iris incarne une sagesse inattendue pour son âge, témoignant d’une réflexion mature sur la tolérance et la richesse de la diversité humaine.

  • En contraste, Giuseppe, plus impulsif et provocateur, adopte une attitude de rejet envers les conventions sociales et religieuses.

  • Ce dualisme enrichit leur dynamique : Iris tempère les excès de Giuseppe, tandis que ce dernier injecte un vent de fraîcheur et de révolte dans son existence.

Analyse des personnages de Giuseppe et Garemesse

Giuseppe

 

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  • Double marginalité : Il est à la fois l'élève rebelle (bonnet d'âne) et le fils privilégié de la directrice. Cette position contradictoire lui donne une liberté unique dans la société rigide dépeinte.

  • Son rapport à l'autorité : Sa contestation des institutions (l'école, l'église) n'est pas gratuite mais révèle une lucidité sur les hypocrisies sociales ("ils jouent les bons fidèles ici, mais moi j'te le dis, au fond d'eux-mêmes, ils ne pensent qu'à leur gueule !").

  • Son don particulier : Sa capacité à voir Iris le place comme intermédiaire entre mondes. Il accepte cette réalité surnaturelle avec un pragmatisme déconcertant, sans questionnement métaphysique, comme si cette faculté était naturelle.

  • Son langage : Son parler familier et parfois vulgaire ("bordel", "squatte", "sale trogne") contraste avec le langage plus soutenu d'Iris. Cette différence linguistique souligne les origines différentes des personnages tout en créant une complémentarité.

 

 

Garemesse 

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  • Garemesse se présente comme une figure profondément mystérieuse et ambivalente. Son apparence physique, marquée par d'horribles cicatrices de guerre, crée immédiatement un effet de seuil entre deux mondes : celui des vivants et quelque chose d'autre, plus difficile à définir.

  • Sa communication singulière : Garemesse ne parle pas directement, préférant l'écrit et les gestes. Cette communication non-verbale le place dans une forme d'altérité, comme s'il appartenait à un système de signification différent du quotidien.

  • Son rapport au temps : Il semble percevoir des réalités invisibles aux autres ("Il semblait recevoir des messages du vent, comme si un esprit lui insufflait des secrets"). Cette sensibilité particulière l'inscrit comme intermédiaire entre différents plans de réalité.

  • Son savoir occulte : Il est présenté comme "l'boss dans le surnaturel", détenteur d'une connaissance qui échappe aux institutions traditionnelles. Sa réponse énigmatique sur "la maison du Démon" suggère qu'il connaît les passerelles entre différentes dimensions.

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La relation entre ces deux personnages et Iris forme un triangle où chacun représente une facette différente de la marginalité : Giuseppe incarne la rébellion sociale, Garemesse représente la rupture traumatique avec la normalité, tandis qu'Iris symbolise le déplacement temporel et ontologique. Ensemble, ils esquissent une communauté des "hors-normes" qui pourrait offrir à la jeune fille une voie de retour vers son époque.

Conclusion

Ce neuvième chapitre , ouvre pour Iris une brèche dans sa solitude spectrale. Après deux mois d'errance entre les mondes, la rencontre avec Giuseppe et Garemesse fait naître l'espoir d'un possible retour en 2024.

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La phrase énigmatique de Garemesse — "Qu'elle fasse ses adieux, et je l'accompagnerai moi-même à la maison du Démon et libre elle sera" — résonne comme une prophétie dont les termes restent à déchiffrer.

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Enfin, la blessure provoquée par l’éclat de la cruche brisée souligne la fragilité paradoxale de sa condition. Ni totalement fantôme, ni pleinement vivante, Iris demeure exposée à des violences physiques et émotionnelles qui renforcent la complexité de sa quête. Cette vulnérabilité mêlée de résilience reflète la profondeur ontologique de son voyage, où les frontières entre corporalité et spectralité deviennent aussi malléables qu’imprévisibles.

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